La pêche est qualifiée d’activité biologiquement durable lorsqu’elle prélève pour un stock de poissons déterminé une quantité maximale d’individus égale au rendement maximal durable. Afin de bien expliquer ce que signifie ce terme de durabilité il est important de revenir sur la définition de « développement durable » et de « rendement maximal durable ».
Le concept de développement durable (DD) est défini dans le rapport « Notre avenir à tous » appelé aussi Rapport Brundtland publié en 1987. Selon ce rapport le développement durable se trouve à la convergence de trois sphères d’intérêt : économique, sociale et environnementale ainsi que le montre la figure ci-dessous.
Le rendement maximal durable (RMD) est un indicateur utilisé en biologie des pêches qui permet théoriquement de connaitre la quantité maximale que l’on peut extraire d’une ressource de poissons sans affecter son abondance future. En gestion des pêches, il permet dans un environnement naturel de productivité donnée de mieux ajuster la pression de pêche pour que la ressource exploitée puisse se pérenniser à son meilleur niveau. Il constitue en fait ce que l’on appelle l’intérêt maximal que l’on peut prélever (captures) sur le capital (stock de poissons) sans que celui-ci s’amenuise.
On le matérialise graphiquement de la manière suivante :
Dans ces conditions, le pêcheur assure la durabilité de son activité en respectant l’aspect environnemental (ressource pérennisée à son niveau optimal) ; l’aspect économique (profit maximal et durable) et social (maintien des entreprises).
Cependant, la réalité est toute autre car si l’on peut admettre que le capital constitué par une ressource de poissons purement marine (thon rouge par exemple) n’est affecté principalement que par l’activité de pêche, cela n’est pas le cas pour des espèces comme l’anguille dont une grande partie du cycle se déroule dans des eaux et des environnements fortement impactés par les activités humaines. Celles-ci ont fortement diminué la surface de production de l’espèce soit par destruction définitive de nombreuses zones humides soit par une édification de barrières qui ont affecté la continuité écologique des bassins versants indispensable à cette espèce pour coloniser l’ensemble de ses habitats potentiels. Dans ce cas, et par rapport au milieu du siècle dernier on voit s’amenuiser la taille de cette population conséquence logique de la diminution de la grandeur de son habitat accessible ; la surface de cet habitat conditionnant la taille de la population. On comprendra aisément que pour revenir à un état antérieur (en ne parlant même pas de l’état pristine = origine) plus favorable, la seule régulation de la pêche est une mesure bien insuffisante et beaucoup trop sectorielle entrainant des sacrifices inutiles des communautés de pêcheurs ne débouchant pas sur les améliorations escomptées.
Quelques chiffres : 90% de l’habitat originel de l’anguille a disparu en Espagne; 65% des zones humides en Europe ont disparu ou bien sont dégradées, 1200 barrages érigés dans le bassin méditerranéen, imperméables ou presque à la migration des civelles ou des anguillettes vers leurs habitats de production continentaux.